Eucalyptus 2018 : gestionnaires de plantations et chercheurs s’organisent face au changement climatique

Couvrant une superficie de 20 millions d'hectares de terres dans une centaine de pays, les plantations commerciales d’eucalyptus servent essentiellement à produire du papier, et les plantations villageoises du bois de chauffage*. Mais celles-ci sont aujourd’hui affectées par le changement climatique. Afin d’échanger sur les solutions d’adaptation des plantations, 225 scientifiques et gestionnaires, d’une trentaine de nationalités, se réunissent à Montpellier du 17 au 21 septembre.

Saviez-vous qu’au-delà de la production de pâte à papier et de bois de chauffage, l’eucalyptus servait de modèle aux scientifiques pour étudier le fonctionnement des arbres en climat tropical, comme le peuplier l’est en climat tempéré ? Originaire d’Australie, cet arbre - dont se nourrissent exclusivement les koalas - est aussi un champion de production de biomasse ligneuse à faible coût ! D’où son intérêt pour des plantations aussi bien industrielles que villageoises (à Madagascar par exemple où il est très utilisé comme bois de chauffage). Mais comme de nombreuses plantes, il subit les effets du changement climatique. Scientifiques et gestionnaires de plantations vont échanger sur les solutions d’adaptation des plantations, cette semaine à Montpellier durant la conférence internationale du groupe « Amélioration et culture de l’eucalyptus », organisée par le Cirad cette année, sous l’égide de l'Organisation internationale de la recherche forestière, l’IUFRO.

D'importants progrès déjà réalisés en matière de gestion de l'eau

Jean-Paul Laclau, chercheur au Cirad en biogéochimie, président de la conférence, nous explique : « Le changement climatique amène des épisodes de sécheresses plus marqués ainsi que de nouvelles maladies et de ravageurs dans les zones de production, comme par exemple la punaise bronzée, un insecte suceur de sève introduit au Brésil en 2008, face auxquels la gestion des plantations d’eucalyptus doit être adaptée » . Les chercheurs travaillent donc à la fois sur les pratiques de culture - pour améliorer l’efficience d’utilisation de l’eau et réduire l’usage d’intrants, développer la lutte biologique contre les ravageurs - et sur l’identification d’eucalyptus plus résistants à certaines maladies ou aux stress hydriques. « D’importants progrès ont déjà été réalisés en matière de consommation d’eau pour faire évoluer les pratiques vers une gestion plus adaptée des bassins versants. C’est ainsi que de nombreuses plantations commerciales ont pu être certifiées FSC, au Brésil en particulier » , précise Jean-Paul Laclau.

Parmi les résultats originaux qui seront présentés durant cette conférence, le Cirad et ses partenaires montreront le rôle majeur de l’enracinement très profond des eucalyptus dans les sols tropicaux pendant les périodes de sécheresse.

Des plantations d'eucalyptus, bientôt en France ?

Outre les stratégies pour faire face aux changements globaux, la conférence sera l’occasion d’échanger sur les services écosystémiques des plantations d’eucalyptus, qui présentent un fort potentiel de stockage du carbone dans le bois (en raison de leur forte capacité à produire de la biomasse) et dans les sols.

Elle permettra aussi d’imaginer l’avenir des filières : « le changement climatique pourrait être une opportunité pour développer les plantations en Europe. Aujourd’hui, l’Espagne et le Portugal sont les principaux producteurs d’eucalyptus, avec environ 1 million d’hectare de surface plantée ». Les plantations d’eucalyptus représentent encore de faibles surfaces en France (essentiellement dans le sud-ouest et sur le pourtour méditerranéen), car les espèces les plus productives sont sensibles aux gelées. Mais « on pourrait imaginer que l’augmentation des températures rende possible une extension des plantations d’eucalyptus dans le sud de la France pour la production de bois énergie et de pâte à papier » . En fin conférence, les participants pourront découvrir les premières plantations expérimentales, conduites par le FCBA, institut technique consacré au bois, non loin de Narbonne et de Carcassonne.

Petite histoire de l’eucalyptus

Le genre Eucalyptus comprend plus de 700 espèces mais seule une petite dizaine d’espèces est aujourd’hui exploitée à grande échelle. Le développement des plantations s’est considérablement accéléré depuis le début du 20ème siècle avec les besoins croissants en bois de chauffage des populations du Sud et la demande de l’industrie papetière.
Le Brésil est aujourd’hui le premier producteur au monde avec 5,5 millions d’hectares de plantations, suivi de l’Inde et de la Chine. Au-delà de la production de fibres pour la pâte à papier, et de la satisfaction de la demande croissante en bois au niveau mondial, les plantations d’eucalyptus auront un rôle important à l’avenir pour fournir des bioproduits, comme de nouvelles générations de biocarburants par exemple.

* L’eucalyptus est utilisé aussi, dans une moindre mesure, comme matériau de construction (panneaux de particules et sciages) ou pour la production de charbon destinée à l’industrie sidérurgique.

Communiqué de presse du Cirad du 17/09/2018

Published: 18/09/2018