Les dispositifs de recherche du Cirad en forêt tropicale valorisés dans la revue Nature

Les traits fonctionnels expliquent la compétition entre espèces d'arbres de façon identique dans toutes les forêts du globe, qu'elles soient tempérées, tropicales ou boréales.

Les arbres vivent en colonies, que l'on appelle communément des forêts. Les arbres rentrent donc fortement en compétition pour les ressources comme la lumière, l'eau, les nutriments. La compétition entre espèces conditionne ainsi la croissance des arbres et le fonctionnement général des écosystèmes forestiers, tant au niveau de la dynamique des espèces et de la biodiversité que de la séquestration du carbone. Comment généraliser les mécanismes déterminant la compétition entre espèces d'arbres en forêt lorsque l'on sait que plus de 3 milliards d'arbres vivent sous toutes les latitudes et que jusqu'à 53 000 espèces d'arbres sont présentes rien que dans les forêts tropicales ?

Une étude sans précédent, parue le mercredi 23 Décembre 2015 dans la revue Nature, qui analyse la croissance de plus de 3 millions d'arbres appartenant à plus de 2500 espèces et répartis dans plus de 140 000 placettes forestières à travers le globe, montre que la densité du bois, la surface foliaire spécifique et la hauteur maximale des arbres permettent de prédire l'intensité de la compétition entre espèces et ce, sous toutes les latitudes, que la forêt soit tropicale, tempérée ou boréale.

L'étude, menée par Georges Kunstler de l'Irstea Grenoble, a regroupé plus de 40 chercheurs internationaux dont trois chercheurs du Cirad travaillant au sein des unités de recherche Biens et Services des Ecosystèmes Forestiers Tropicaux (BSEF) et Ecofog. Le Cirad et ses partenaires au Sud (le MEFCP et l'ICRA en République centrafricaine) ont également contribué à l'étude en mettant à disposition les données d'inventaires forestiers récoltées méthodiquement depuis près de 35 ans sur les sites de Paracou en Guyane Française et de M'Baïki en République Centrafricaine.

Un résultat intéressant de l'étude, et surprenant compte tenu des connaissances que l'on avait sur le fonctionnement des communautés et la niche écologique des espèces, est que la compétition n'est pas forcément diminuée si les espèces sont très différentes (plus dissemblables du point de vue de leurs traits). Les traits fonctionnels seraient plutôt à l'origine de compromis sur la croissance (“trade-offs” en anglais). Ainsi, une espèce d'arbre à densité du bois élevée a une croissance lente mais est résistante à la compétition. Ce résultat est généralisable à toutes les forêts du globe. Dans un paysage forestier où les perturbations peuvent créer des trouées qui se referment petit à petit avec la régénération, des espèces très dissemblables (à forte et faible densité du bois par exemple) peuvent ainsi coexister malgré la compétition.

Publication originale:

Kunstler G, Falster D, Coomes DA, Hui F, Kooyman RM, Laughlin DC, Poorter L, Vanderwel M, Vieilledent G, Wright SJ, Aiba M, Baraloto C, Caspersen J, Cornelissen JHC, Gourlet-Fleury S, Hanewinkel M, Herault B, Kattge J, Kurokawa H, Onoda Y, Penuelas J, Poorter H, Uriarte M, Richardson S, Ruiz-Benito P, Sun I-F, Stalh G, Swenson NG, Thompson J, Westerlund B, Wirth C, Zavala MA, Zeng H, Zimmerman JK, Zimmermann NE, Westoby M. 2015. Plant functional traits have globally consistent effects on competition. Nature in press (accepted 23 Nov 2015). xx. doi:10.1038/nature16476. <http://dx.doi.org/10.1038/nature16476>

 actualité rédigée par Ghislain Vieilledent

Publiée : 04/01/2016