Notre planète ne serait pas habitable sans les forêts

À l’occasion de la Journée internationale des forêts, le 21 mars, un collectif international de 850 chercheurs, étudiants, ingénieurs et techniciens en appellent à l’urgente sauvegarde des forêts tropicales, pour les populations rurales et le monde en général.

En cette journée internationale des forêts, tandis que les  forêts tropicales disparaissent  et se dégradent dans un contexte de changement climatique de plus en plus alarmant, nous, chercheurs, chercheuses, étudiants, étudiantes, ingénieurs, ingénieures, techniciens et techniciennes lançons un cri d’alarme pour appeler à préserver les écosystèmes forestiers tropicaux, afin que notre planète reste habitable pour les générations à venir.

Nous voulons un monde où les dirigeants politiques dépassent les effets de communication, et les déclarations d’intention, dans les COP et autres sommets mondiaux pour faire cesser avec détermination la conversion des forêts tropicales au profit de l’agriculture, de l’élevage, de plantations industrielles et d’exploitations minières.

Nous voulons un monde où ces actions de lutte contre la déforestation et la dégradation soient justes, qu’elles considèrent les contextes sociaux et s’appuient sur un partage des responsabilités et une solidarité entre les pays, ainsi que sur les connaissances et outils de suivi des forêts élaborés par la recherche scientifique.

Nous voulons un monde où les forêts tropicales soient conservées et restaurées à travers des pratiques de gestion durable prenant en compte l’ensemble de leurs habitants, humains et non-humains. Nous voulons que les pays engagés dans l’initiative du  Défi de Bonn , qui a pour objectif de restaurer 350 millions d’hectares de forêts et de territoires forestiers d’ici à 2030, répondent enfin à leurs engagements par des actions concrètes, en concertation avec les acteurs des territoires et au profit des populations rurales et de la société en général.

Nous voulons un monde où le droit des peuples autochtones et des populations forestières à gérer leurs propres ressources forestières soit reconnu et où la gestion forestière par ces populations soit encouragée par les politiques publiques.

« Nous voulons un monde qui prenne ses responsabilités »

Nous voulons un monde où les forêts tropicales naturelles ne constituent plus la seule et principale source de bois de la plupart des pays tropicaux producteurs. Nous voulons un monde où les politiques publiques combattent avec détermination l’exploitation illégale de bois d’œuvre et de bois énergie, principale source de dégradation des forêts, et encouragent une exploitation certifiée durable, réalisée en priorité par et au profit des communautés forestières.

Nous voulons un monde où des programmes de restauration forestière sont pensés comme des opportunités pour développer de nouveaux modes de production de bois, tel le développement d’agroforêts.

Nous voulons un monde où les incitations à la conservation des forêts ne se limitent plus à mettre une valeur marchande sur la capacité des forêts à compenser nos émissions de CO2 en le capturant. Nous voulons un monde dans lequel on reconnaît au même niveau les autres services rendus par les forêts tropicales et qui permettent la production et le maintien du bien-être humain : biodiversité, régulation du climat, protection des sols et des eaux de surface, identités culturelles et symboliques. Nous voulons un monde qui respecte l’habitat et les moyens de subsistance de populations vulnérables, dont 60 millions de personnes indigènes.

Nous voulons un monde où les forêts tropicales ne soient plus considérées comme un obstacle au développement économique des pays du Sud, mais au contraire comme des écosystèmes clés pour que l’agriculture de demain soit durable et productive, car  bénéficiant des services rendus par les forêts . Nous voulons donc un monde qui s’engage dans une transition agricole capable de proposer des systèmes agraires alternatifs, qui ne se développent plus aux dépens des forêts naturelles, mais puissent s’étendre sur des zones  déjà déboisées ou des terres dégradées .

« Notre planète ne saurait être habitable sans les forêts »

Nous voulons un monde qui reconnaisse que ces forêts sont pourvoyeuses de bien-être et d’innombrables services écologiques rejaillissant sur l’ensemble des milieux,  ruraux ou urbains . Nous reconnaissons les valeurs identitaires, culturelles et symboliques qu’elles sous-tendent, mais aussi leur simple valeur d’existence et ne craignons pas d’affirmer qu’elles sont prodigues d’une beauté dont nous avons tous besoin.

Nous voulons un monde qui prenne ses responsabilités et mette fin dès maintenant à la destruction des forêts tropicales et des formes de vivant qui en dépendent. La déforestation et la dégradation des forêts tropicales ne sont pas des fatalités, elles sont le résultat de choix politiques, d’encouragement ou de laisser-faire. De nombreux exemples concrets dans un passé récent ont montré qu’avec une volonté politique déterminée, il est possible de renverser la tendance.

Le temps n’est plus aux annonces, mais à l’action ; il en va de notre survie, comme de celle du vivant en général, car notre planète ne saurait être habitable sans les forêts.

Publiée : 21/03/2023