Les services écosystémiques seraient-ils sexués ?

Les services écosystémiques tendent à être orientés par le genre, ce qui signifie que les hommes et les femmes bénéficient différemment des écosystèmes, en raison d'aspects culturels, de leurs rôles spécifiques, des institutions et de la gouvernance. Telle est l'hypothèse dont se sont saisie les auteurs d'une étude conduite au Nicaragua, à laquelle a participé Laurène Feintrenie, de l'UPR Forêts et Sociétés.

L'étude des services écosystémiques (SE) est un domaine de recherche prolifique. Pourtant, malgré la grande diversité biologique et culturelle de l'Amérique latine, la recherche dans ce domaine s'y est développée à un rythme beaucoup plus lent que dans le reste du monde. L'étude des SE est appelée à contribuer à la prise de décisions éclairées pour l'aménagement et la conservation du territoire et à l'amélioration du bien-être. Mais cela ne peut se faire que si l'on tient compte de la vision des différents acteurs sur leur environnement, car ce sont eux qui sont le plus impactés par ces décisions.
Notre étude a été menée dans neuf communautés rurales de trois municipalités du centre et du nord du Nicaragua, un pays rural avec des taux élevés de pauvreté rurale. Nous nous sommes interrogés sur les perceptions de l'utilisation des terres rurales en tant que fournisseurs de SE par les communautés rurales, selon une perspective de genre. Nous avons abordé cette question dans le cadre de l'approche des moyens de subsistance durables (Sustainable Livelihoods Approach SLA), qui nous a permis de mettre en relation des sujets aussi divers que l'étude des SE, du genre et des utilisations des terres. Dans chaque communauté, nous avons d'abord demandé l'aval des chefs communautaires, puis nous avons mené des entretiens semi-structurés et des groupes de discussion séparés pour les hommes et les femmes. Nous avons utilisé la cartographie participative et la méthode de distribution de cailloux (Pebble Distribution Method PDM), pour identifier comment l'identité de genre influence les perceptions sur les bénéfices, la localisation et l'accès aux SE.
Il ressort de cette étude que les hommes et les femmes reconnaissent les avantages de la nature mais diffèrent dans l'identification des utilisations des terres qui fournissent le plus de SE. Les exceptions étaient les zones forestières, les systèmes agroforestiers et les rivières, qui étaient tous reconnus comme fournissant la plus grande quantité de services.
Ces résultats sont particulièrement utiles pour l'élaboration de politiques publiques visant à réduire la pauvreté et à combler les écarts entre les sexes dans les communautés rurales.

Publiée : 07/09/2021